Église Saint-Thibaut : Marly le Roi (78)
Chers amis voyageurs,
Vous vous souvenez sans doute, été 2020 je proposais à quelques-uns ne partant pas en vacances, et à d’autres aussi, de voyager sans bouger de chez soi, d’acheter son billet sans dépenser d’argent, (cf Is 55,1 et sv), de choisir la meilleure place -il y en une pour chacune et chacun- pour des visites d’églises en premières impressions, c’est-à-dire juste accueillir ce qui se donne à voir sur l’instant.
Cet été 2021 fut un été sans voyage mais l’occasion s’offrit durant les vacances de Toussaint et je pus vous préparer le chemin. Ce temps de vacances est derrière nous, c’est vrai, mais si vous en avez le désir les portes vont s’ouvrir pour vous. Le temps ne vous sera pas compté, qu’il s’appelle « vacances » ou « ordinaire », ou mieux encore, temps de l’Avent dans lequel nous sommes maintenant.
Je propose de vous emmener à Marly-le-Roi (78) et de gagner l’église Saint Thibaut. Délaissant le vieux village avec ses rues charmantes aux maisons colorées, en sortant de la gare, je pique à droite. Il fait beau, marcher à l’ombre est plaisant. Bientôt nous atteignons l’église. Moderne, en béton, toiture en forme de deux voiles qui coiffent la nef et s’étirent en pointe élevée au-dessus du chœur, une autre forme de clocher qui, de dehors fait comme un doigt pointé qui désigne le Ciel.
La porte franchie, la large nef s’ouvre devant moi. Toute mon attention est ravie par les grandes orgues derrière l’autel. Comme un immense oiseau aux ailes déployées, ils semblent veiller sur l’Agneau sculpté en bas-relief sur l’antependium de l’autel. Entrant en moi-même, je rétablis les proportions invisibles et ici visuellement inversées entre l’instrument et l’autel, un rai de lumière qui les relie en révèle le chemin.
Comme en toute église l’orgue occupe une place particulière, dans les hauteurs, touchant presque la voûte qui symbolise la voûte céleste. Il fait lien entre le Ciel et la terre : la liturgie célébrée ici-bas épouse celle qui est chantée là-haut. À l’orgue le musicien est lui aussi un prédicateur, mais sous une autre forme et chacun dans l’assemblée se sent élevé à l’écoute de la musique sacrée simplement parce qu’il reçoit la capacité d’y participer : l’homme est le lieu du sacré.
Tout de suite à gauche, une fois dans l’église, un oratoire à l’ambiance chaude propice au silence et à s’éterniser intérieurement quelques instants. On dirait la pluie d’or de Danaé répandue sur le miel des bancs de bois.
S’avancer dans l’allée centrale et voir plus que jamais la nef comme une carène retournée et l’orgue est la proue du navire à l’envers… le fond devient la cime, et celui qui de droit divin était cime se fait fond. Le Très Haut devient le Très Bas. Le Royaume à tête-bêche. L’autel d’or porte sur ses épaules la colonne de nuées et là-haut l’arrête faîtière est fenêtre longue, fenêtre vers le ciel, effraction de lumière, fissure de Dieu.
Dieu plante sa tente parmi nous. Voici ses pans et la colonne de verre est un mât.
Puis faire le chemin inverse, remonter depuis le chœur, voir ces sombres vitraux latéraux qui donnent le ton : on ne peut voir Dieu qu’avec les yeux du cœur.
Que ce temps de l’Avent soit un temps de désir semblable au désir de Dieu et qu’en chacune et chacun soient unis Ciel et terre.
Bonne balade à toutes et à tous.
Xavier et Anne Miguet, poète et complice pour les passages en italique.